Une consultation, ça sert réellement à quelque chose
Les représentants du personnel doivent prendre le temps de préparer avec soin les consultations du CSE, c’est vital
Quel que soit son objet, la consultation ne sera utile pour le CSE et les salariés que si les élus ont pris le temps de la préparer. Cela signifie, notamment, qu’il faut lire et analyser les documents transmis par la direction, se plonger dans les informations économiques, sociales et financières de la base de données économiques, sociales et environnementales de l’entreprise, rechercher des informations complémentaires à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise, lister les points qui doivent être approfondis, préparer une liste de questions à poser à l’employeur, rencontrer les salariés qui seront éventuellement concernés, prendre contact avec des personnes extérieures à l’entreprise (médecin du travail, expert-comptable, avocat du CSE, etc.), s’informer auprès des CSE des autres établissements de l’entreprise, envisager de se faire assister par un expert, etc
Si ce travail de préparation n’est pas fait, les membres du comité risquent de ne pas être en mesure de rebondir sur l’information donnée par l’employeur le jour de la réunion. Il n’y aura guère de débat et l’avis sera donné sans grande conviction et sans aucune motivation.
En résumé, il faut arriver en réunion avec un dossier le plus complet possible, c’est le seul moyen de mettre toutes les chances de son côté pour réussir à faire bouger les lignes. Il faut cependant avoir conscience que le temps joue contre le CSE. En effet, qu’elles soient récurrentes ou ponctuelles, les consultations du comité social et économique sont encadrées dans le temps.
Une consultation permet au CSE de s’exprimer et d’émettre un avis dont l’employeur a besoin pour exécuter ses décisions
Il ne faut pas s’arrêter à l’idée que le CSE ne peut pas s’opposer aux décisions et projets
de l’entreprise
Certains élus ont tendance à considérer qu’émettre un avis ne sert pas à grand-chose puisque la direction n’est pas tenue de le suivre. C’est vrai, le comité social et économique n’a pas de pouvoir de cogestion de l’entreprise, l’employeur n’est pas obligé de tenir compte d’un avis négatif. Il y a là une frustration qu’il faudra apprendre à gérer dans l’exercice de son mandat. Cela ne veut pas pour autant dire que les consultations du comité social et économique sont inutiles, ce serait même une erreur de le penser. Douter de l’utilité de la consultation du CSE reviendrait en effet à douter de l’efficacité de l’action menée par le CSE.
Et surtout, il ne faut pas perdre de vue que la consultation a un caractère préalable. L’employeur a donc besoin de l’avis consultatif du CSE, qu’il soit positif ou négatif, pour pouvoir mettre en œuvre ses projets et décisions
Veiller à la prise en compte des intérêts des salariés et essayer de faire bouger les lignes,
c’est à ça que sert une consultation
Comme nous le dit le code du travail, un CSE a pour mission d’assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production (C. trav., art. L. 2312-8). Cette mission, le comité va pouvoir la remplir au moment des consultations obligatoires.
Il faut être réaliste, certaines consultations sont vraiment plus importantes que d’autres. Consultations récurrentes sur les orientations stratégiques de l’entreprise, sa situation économique et financière et, enfin, sa politique sociale, l’emploi et les conditions de travail, consultations ponctuelles en cas de réorganisation d’un département, de délocalisation, de fusion avec une autre société, de mise en commun des services support du groupe, de Leverage Buy-Out (LBO), de plan de sauvegarde de l’emploi…, c’est sur ce genre de consultations qu’il faudra se concentrer et accepter l’idée de laisser tomber les autres.
D’une manière générale, la consultation doit permettre aux membres du CSE :
- de disposer d’informations précises et écrites en rapport avec l’objet de la consultation. Par exemple, sur les orientations stratégiques de l’entreprise, sur un projet de restructuration, d’aménagement important impactant les conditions de travail, etc. La qualité de l’information, c’est un point de départ qui est fondamental pour les représentants du personnel ;
- d’analyser, pour les faire parler, les informations brutes fournies, d’essayer d’anticiper le plus possible les changements et les risques à venir pour les salariés en termes d’emploi, de santé et de sécurité, de conditions de travail, etc., de poser des questions à l’employeur pour comprendre ses motivations et obtenir davantage d’informations, de s’assurer des modalités de mise en œuvre des changements en termes de moyens, etc. ;
- d’essayer de provoquer un échange avec la direction, d’exprimer leur point de vue sur les choix de l’entreprise, de faire remonter la réalité du terrain et d’apporter des informations complémentaires, d’émettre des réserves en pointant du doigt certaines insuffisances, contradictions ou incohérences, de faire des contre-propositions et des préconisations, de négocier certains points du projet présenté, etc.
Par exemple, en principe tous les ans, il y a la consultation du CSE sur les orientations stratégiques de l’entreprise et sur leurs conséquences sur l’activité, l’emploi, l’évolution des métiers et des compétences, l’organisation du travail, etc.. Pourquoi ces orientations ? Sont-elles cohérentes par rapport à la situation du marché, par rapport à la concurrence ? Avec quels moyens ? Dans quelles conditions ? etc. Aux élus de poser ces questions et, ensuite, d’émettre un avis bien motivé expliquant sa position.
Dans bien des cas, l’employeur présente au CSE un projet déjà bien ficelé. Certains élus s’inquiètent de n’avoir aucune influence sur ce projet et se sentent démunis. C’est pourquoi les élus doivent retenir 3 mots :
- Chercher : ils doivent d’abord chercher ce qui est à l’origine du projet, ce qui pousse l’employeur à le mettre en place. Pourquoi un tel projet est présenté au comité ? Quel(s) événement(s) pousse(nt) l’employeur à le proposer ? Quels éventuels problèmes sont à l’origine de ce projet ? Quelle est l’étendue de ces problèmes ?Pourquoi l’employeur présente-t-il ce projet maintenant et non pas avant ou plus tard ? etc.
- Comprendre : ils doivent ensuite comprendre la solution que l’employeur apporte avec son projet. Quel est le contenu du projet ? Quels sont les salariés concernés ? Quels problèmes ce projet devrait-il résoudre ? Quel est l’impact du projet sur l’emploi des salariés, leurs conditions de travail et d’emploi, leur santé et leur sécurité ? etc. ;
- Mesurer : ils doivent enfin mesurer la finalité du projet, s’il permet effectivement de résoudre les problèmes visés. Ce projet permet-il de résoudre tous les problèmes ? Si non, quels problèmes ne peuvent pas être résolus avec ce projet ? Pourquoi ne le peuvent-ils pas ? Existe-t-il d’autres solutions plus adaptées ? Qu’est-ce que les membres du CSE peuvent proposer pour améliorer le projet ? etc.
De même, le CSE peut relever des défaillances de l’employeur dans ses obligations. Tel est le cas s’il estime ne pas disposer d’éléments d’information suffisants ou précis pour mesurer les impacts d’un projet sur la santé et la sécurité des salariés. Par exemple, si l’employeur n’a pas évalué correctement les risques psychosociaux résultant de la mise en place de son projet ou bien s’il n’a pas tenu compte dans son projet de l’expertise commandée par le CSE.
OBSERVATIONS
Un avis consultatif, on le motive
Il est aussi très important de bien comprendre qu’une consultation ne se résume pas à l’avis, positif ou négatif, favorable ou défavorable. Émettre un avis veut dire émettre une opinion. Or, cette opinion n’aura de chance de faire bouger les lignes que si elle est bien expliquée et justifiée. En résumé, l’avis consultatif émis par le comité social et économique doit être motivé. C’est d’autant plus important que l’employeur a l’obligation de rendre compte, en la motivant, de la suite donnée aux avis et vœux du comité social et économique (C. trav., art. L. 2312-15).
En partenariat avec Lefebvre Dalloz :
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