Alerter l’employeur en cas de danger grave et imminent

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Alerter l’employeur en cas de danger grave et imminent

Participer à la prévention des risques professionnels fait partie des missions du essentielles du CSE. D’où cette possibilité qu’a tout représentant du personnel de saisir l’employeur lorsqu’il constate, directement ou par l’intermédiaire d’un salarié, qu’il existe une cause de danger grave et imminent. C’est ce que l’on appelle le droit d’alerte pour danger grave et imminent. Reste à savoir ce qu’est un danger grave et imminent.

Tout membre du CSE peut tirer une sonnette d’alarme en cas de danger grave et imminent : c’est le droit d’alerte


Le code du travail prévoit que tout représentant du personnel au CSE peut saisir l’employeur lorsqu’il constate, directement ou par l’intermédiaire d’un salarié, qu’il existe une cause de danger grave et imminent (C. trav., art. L. 4131-2). C’est ce que l’on appelle le droit d’alerte pour danger grave et imminent. Cette possibilité de tirer une sonnette d’alarme sert à la fois à informer l’employeur de la situation et à l’obliger à prendre les mesures de prévention nécessaires s’il y a effectivement une cause de danger pour la santé et la sécurité des travailleurs. Mais attention, car le droit d’alerte ne donne pas au représentant du personnel le droit d’arrêter les machines.

Indépendamment de ce droit d’alerte, chaque salarié dispose d’un droit de retrait qui lui permet de cesser immédiatement de travailler lorsqu’il se trouve dans une situation dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé (C. trav., art. L. 4131- 2).

Une fois l’alerte déclenchée, l’employeur ne peut rester inactif. Il doit obligatoirement réagir en menant une enquête, voire en organisant une réunion d’urgence du CSE. Si nécessaire, il sera même tenu de saisir l’inspecteur du travail. D’où l’intérêt qu’il peut y avoir à déclencher le droit d’alerte lorsqu’un salarié a fait jouer son droit de retrait.

Reste à savoir dans quel genre de situation on peut considérer qu’il y a danger grave et imminent


Ce n’est pas facile à apprécier

Le danger est une menace pour la vie ou la santé physique du salarié. Il peut par exemple émaner d’une machine, d’une ambiance de travail ou d’un processus de fabrication. La santé mentale du salarié peut également être menacée par une situation anormale de harcèlement sexuel (CA Riom, 18 juin 2002, no 01/00919) ou moral.

Il est impossible de donner une définition générale de ce qu’il faut entendre par danger grave et
imminent car tout dépend des circonstances de fait. C’est une notion que les juges apprécient au cas par cas quand il y a un contentieux.

Ce danger doit être :
grave : il doit être susceptible d’entraîner des conséquences fâcheuses, des suites sérieuses. D’après l’administration, un danger est grave lorsqu’il est « susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée » ;
imminent : cela signifie que le risque doit être susceptible de se réaliser dans un délai très rapproché. Il importe peu que le dommage se réalise en un instant ou progressivement, du moment qu’il puisse être envisagé dans un délai proche.

L’existence d’un danger grave et imminent ne concerne pas seulement le risque d’accident. Le risque de maladie doit également être pris en compte. Ainsi, un danger grave et imminent peut être la cause d’un accident, une brusque asphyxie, ou d’une maladie, une intoxication plus ou moins rapide due à des émanations toxiques.

Attention, car il ne faut pas confondre danger grave et imminent et risque habituel lié à l’exercice normal d’un travail. Il faut donc tenir compte du type d’activité exercée. L’exercice de certaines activités peut, en soi, être pénible, voire dangereux. Il n’y a pas pour autant danger grave et imminent car cela fait partie des conditions normales et habituelles de travail.

Par exemple, le seul fait de travailler sur un site nucléaire ne suffit pas à prouver l’existence d’un danger grave et imminent (CA Versailles, 26 févr. 1996, no 22877/94). Idem pour le salarié travaillant pour une entreprise de transport de fonds, le risque d’attaque armée étant inhérent à la fonction (CA Aix-En-Provence, 8 nov. 1995, no 92/6287) ou pour le salarié du BTP ayant parfois à travailler alors qu’il pleut et qu’il y a du vent (Cass. soc., 20 janv. 1993, no 91-42.028). En revanche, un tel danger existe bien lorsque les conditions météorologiques ne sont pas bonnes en raison de la neige, du vent et du froid et que le chantier extérieur de grande hauteur est démuni de système de protection efficace (ligne de vie, système antichute, filet) (CA Douai, 30 sept. 2008, no 07/02873).

Des exemples de jurisprudence

Les contentieux apparaissent surtout lorsque l’employeur estime qu’un salarié a fait jouer à tort son droit de retrait parce qu’il s’estimait en situation de danger grave et imminent. Ainsi, l’existence d’un tel danger a été admise dans les situations suivantes :
veilleur de nuit d’un foyer confronté à l’attitude menaçante d’un des locataires du foyer en état d’ébriété (CA Paris, 27 mars 1987, no 33604/85) ;
défaut persistant de conformité des installations de l’entreprise avec les normes de sécurité (Cass. soc., 1er mars 1995, no 91-43.406) ;
camion dont le système de freinage est défectueux et qui a fait l’objet d’une interdiction de circulation tant qu’il ne serait pas réparé (CA Montpellier, 30 avr. 1998, no 96/00627) ;
absence de chaussures de sécurité, de casques, de filets de protection, de lunettes de protection et de masques antipoussières (CA Douai, 29 avr. 2005, no 04/01725) ;
ambulance dont le pare-brise était susceptible de voler en éclats en cours de trajet et dépourvu de rétroviseur central, d’où une visibilité réduite (CA Metz, 17 janv. 2006, no 03/02359) ;
gabarits servant pour le découpage de joints caoutchouc contenant de l’amiante et défaut de protection du salarié (CA Metz, 6 févr. 2006, no 03/00175) ;
changement d’un joint d’amiante, sans équipement spécialisé de protection, ayant provoqué une irritation aux yeux du salarié (CA Montpellier, 20 mars 2002, no 00/01655) ;
engin de levage n’ayant ni stabilisateurs, ni crochets de sécurité, aucun mode d’emploi n’ayant été fourni au salarié (CA Reims, 21 janv. 2009, no 07/02126).

Il n’est pas nécessaire que la cause du danger soit exclusivement étrangère à la personne du salarié. Un salarié, dont l’état de santé ne lui permet pas d’être en contact avec des animaux ou des produits chimiques, peut invoquer un danger grave et imminent lorsque l’employeur le mute à un tel poste (Cass. soc., 20 mars 1996, no 93-40.111).

OBSERVATIONS

Plus on tire de sonnettes d’alarme, mieux c’est !

D’un côté, il y a le droit d’alerte du CSE, de l’autre, le droit de retrait du salarié. Ces mécanismes, tous deux organisés en cas de danger grave et imminent, sont autonomes. Un salarié peut donc faire usage de son droit de retrait, même si le CSE n’a pas déclenché la procédure d’alerte (Cass. soc., 10 mai 2001, no 00-43.437). Le médecin du travail dispose également d’un « droit d’alerte ». Lorsqu’il constate un risque pour la santé des travailleurs, il propose par écrit des mesures visant à la préserver.
L’employeur doit en tenir compte et, en cas de refus, le justifier (C. trav., art. L. 4624-9). Alors pourquoi ne pas contacter le médecin du travail en prime ? En pratique, plus on tire de sonnettes d’alarme, mieux c’est !

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